Un tramway nommé désir, ou Beausobre magnifiquement éclairé à la cigarette

Cristiana Reali, épatante dans son rôle de Blanche DuBois. Photo: De Lage.
À la fois moite et envoûtante, la mise en scène du classique de Tennesse Williams par Pauline Susini a transformé le Théâtre de Beausobre lors d’une représentation poignante, portée par un Stanley et une Blanche remarquables.
On se demande d’abord si les blondes qu’allume frénétiquement le grand brun bellâtre sont bien réelles; jusqu’à ce que les effluves de tabac ne viennent remplacer le relent d’eau de Cologne sur les sièges rouges du public, dissipant fortement le doute. Et voici l’élégant théâtre morgien transformé en une Nouvelle-Orléans suffocante, mais tout sauf vulgaire.
Jeudi soir, la représentation de Un tramway nommé désir a plongé Beausobre dans une atmosphère moite et oppressante, fidèle à l’univers du dramaturge américain. La mise en scène de Pauline Susini, habile, a mis en lumière les tensions palpables entre les personnages, renforcées par un jeu aussi magnifique que subtil d’éclairages, oscillant entre illusions, temps qui passe et brutalité.
L’excellente Cristiana Reali a incarné une Blanche DuBois à la fragilité troublante, indéniablement habitée par son rôle et dont la prestation justifie amplement le Molière qui lui a été décerné l’an dernier. Très drôle, souvent malgré elle, l’ancienne belle du Sud traumatisée par la séparation de son jeune mari est aussi terriblement touchante.
Face à elle, le Stanley Kowalski brillamment interprété par Benjamin Gazzeri Guillet a su transmettre la brutalité de son personnage: sa présence scénique imposante et son jeu nuancé ont instauré une tension constante, reflétant la violence sous-jacente de la pièce. Mention spéciale également à Lionel Abelanski, très juste et sympathique dans son rôle du sensible Mitch.
La pièce en elle-même a confirmé son actualité frappante de par les thématiques abordées. D’une part, les différences de classes, l’alcool et les jeux d’apparences. Mais aussi les relations abusives, l’emprise, le rejet de l’homosexualité et la violence conjugale. Dommage qu’une part non négligeable du public ait plus d’une fois semblé prendre ce second volet à la légère en y voyant un sujet de dérision; c’était sans doute une question de générations.
Malgré sa longueur (2h15), la pièce a aisément su trouver son rythme dans un récit très maîtrisé, sans grande surprise, mais aussi divertissant que percutant.
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