Oui, les voitures pourraient revenir
La Municipalité va présenter au Conseil communal un préavis proposant la fin de la Grand-Rue piétonne. Une option comme solution pour régler les problèmes de circulation en ville.
«Ce n’est pas de gaité de cœur, mais il faut faire des concessions quand on essaie de régler un problème.» La mine sombre, Mélanie Wyss est consciente qu’elle ne va pas au-devant de discussions agréables au moment de présenter un préavis d’urgence. Ce dernier demande au Conseil communal un crédit de 125 000 francs pour «l’étude du projet de réintroduction de la circulation dans la Grand-Rue».
Un projet aussi surprenant qu’inattendu, compte tenu de l’époque actuelle et du Plan communal des mobilités qui doit être prochainement débattu par le Conseil. «Avec ce document, on pense à une organisation à long terme, mais la situation est telle que nous nous devons d’agir au plus vite», poursuit la syndique.
L’objectif serait ainsi de rabattre le trafic sur cet axe – bidirectionnel – afin de libérer les quais. Une option stratégique qui n’a pourtant rien de nouveau.
Un air de déjà vu
En effet, et bien des Morgiens s’en souviennent, cela ne fait pas si longtemps que la Grand-Rue est piétonne. Cela fera même trente ans cette année que l’Exécutif morgien en a fait l’annonce officielle. C’était en février 1992 pour une inauguration le 16 avril 1993. Une longue durée qui s’explique par la nécessité de traiter un recours déposé par la Société industrielle et commerciale (SIC) représentant les commerçants et s’opposant à la décision municipale. Ces derniers n’en étaient d’ailleurs pas à leur coup d’essai. En 1988, alors que le syndic de l’époque Jean-Michel Pellegrino présente à la population un nouveau plan d’aménagement du centre qui tend à donner la priorité aux piétons et à rendre payantes les places de parc de la Grand-Rue, les commerçants sont 90 % à rejeter l’option d’en faire une rue uniquement piétonne.
Nous avons déjà l’autoroute qui coupe la ville en deux et maintenant ce serait la Grand-Rue? On ne laissera pas faire ça!
Hamza Palma, conseiller communal Vert
À cet instant, les autorités évoquent plus volontiers une variante mixte: des piétons prioritaires, mais des voitures présentes et des places de parc. Alfred Friederici propose même dans le Journal de Morges en juin 1990 l’éventualité de créer une voie souterraine. Une possibilité qui sera étudiée par la Municipalité, mais finalement abandonnée.
Un an plus tard, les travaux de réaménagement de la Grand-Rue projetant de larges trottoirs, une allée centrale pour les voitures et le retour des pavés commencent. Un chantier qui coupe la circulation, donnant des idées à certains conseillers communaux qui déposent une interpellation demandant de rendre la Grand-Rue aux piétons. Une fois le texte accepté par l’organe délibérant, l’Exécutif lance un sondage à la population qui s’annonce positif. Nous sommes en 1992 et cet axe majeur de la vieille ville s’apprête à perdre définitivement ses voitures.
De retour?
La Grand-Rue n’est donc piétonne «que» depuis une trentaine d’années. Avant cela, la majorité de son existence s’est faite avec du trafic (qu’il soit automobile ou en calèche). Et cette réalité pourrait bien revoir le jour avec ce préavis d’urgence. Pour les Verts, il n’en est pas question. «Nous avons déjà l’autoroute qui coupe la ville en deux et maintenant ce serait la Grand-Rue? On ne laissera pas faire ça!», explose Hamza Palma, conseiller communal. Pour ce dernier, ce n’est pas une solution. «On considère le trafic comme problème numéro un, mais ce n’est pas le cas, ce sont les voitures. Tant que le nombre d’automobiles augmentera, les soucis liés à la circulation aussi, il faut donc s’attaquer à la base du problème.»
Nous nous devons d’étudier toutes les options, souligne la syndique. C’est un axe comme les autres, par conséquent nous nous y intéressons aussi
Mélanie Wyss, syndique de Morges
Si le projet n’est même pas encore au stade d’étude, le jeune élu envisage déjà de faire de la résistance. «On va se battre, quitte à proposer aux artisans du marché de laisser leur stand sur place aussi longtemps que possible pour faire plier la Municipalité», imagine-t-il. Du côté de l’Exécutif, on se défend de simplement faire le job. «Nous nous devons d’étudier toutes les options, souligne la syndique. C’est un axe comme les autres, par conséquent nous nous y intéressons aussi.»
«Quitte à remonter dans le temps, alors réinstaurons les calèches, ironise Hamza Palma. Au moins ça, ce serait un bon point pour le tourisme.»
Calendrier à venir
Avec ce préavis d’urgence, le Conseil communal est appelé à se prononcer directement lors de la séance de mercredi prochain. On imagine d’ores et déjà que le sujet va attiser les débats et que le clivage gauche-droite déjà bien perçu depuis le début de la législature risque de faire des étincelles.
En cas d’acceptation du préavis, les études seront lancées aussitôt pour une durée entre neuf et dix mois. Puis l’Exécutif reviendra devant le Conseil avec une demande de crédit pour la réalisation.
Pavés aux enchères
Si le projet devait se concrétiser, le revêtement de la Grand-Rue ne pourrait évidemment pas rester tel quel. L’asphalte retrouverait la place qui était la sienne avant les années nonante. Un gros travail de dépavement sera alors nécessaire. Mais pas question de simplement jeter ces pavés mythiques. «Nous envisageons de réaliser une vente aux enchères où chaque Morgienne et chaque Morgien pourront acquérir un petit bout d’histoire de leur ville», confie Mélanie Wyss. L’occasion pour tout un chacun de conserver un lien avec une page historique de la Coquette.
Commandez votre pavé
En cas de concrétisation du projet, le Journal de Morges a d’ores et déjà réservé 1110 pavés de la Grand-Rue qu’il vous fait gagner. Il suffit de scanner le QR code ci-dessous et de remplir le formulaire afin de commander deux, quatre ou six pavés. Premier arrivé, premier servi!
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