Le point de vue de la rédaction: Le vin sans alcool: bêtise ou vraie tendance?

De g. à d.: Maxime Rutschmann, Sarah Rempe, Maxime Schwarb et Lucas Philippoz
À l’heure où Divinum bat son plein, le vin désalcoolisé fait son entrée sur certains stands. Au pays du Chasselas, est-ce un affront ou une occasion pour les vignerons d’élargir leur clientèle et pour celle-ci de découvrir de nouvelles saveurs? La rédaction donne son avis.
La boisson mérite d’être dégustée
Évidemment, dans une région viticole comme la nôtre, le sujet est brûlant et je ne compte pas me fâcher avec les vignerons. Rien, à mon sens, ne vaudra un bon repas accompagné d’un succulent verre de rouge ou l’apéro du samedi autour d’une bouteille de Chasselas ou de Chardonnay. D’ailleurs, pour avoir connu quelques problèmes de santé me demandant de stopper l’alcool, je dois avouer n’avoir jamais retrouvé le plaisir des saveurs du vin avec un verre de Coca ou de sirop grenadine et plusieurs amies enceintes m’ont également fait part de cette frustration. Le vin désalcoolisé peut-il combler ce plaisir-là ou suffit-il de boire autre chose? La question mérite d’être posée, et la boisson d’être au moins dégustée. Quant à savoir si le vin sans alcool remplacera notre bien aimé Chasselas sur la table de l’apéro, je pense que la question ne se pose même pas. En revanche, si le sans alcool nous permet de trinquer tous ensemble, sans exclure ceux qui ne peuvent pas boire, je dirais: pourquoi pas?
L’envie d’essayer
Je suis de plus en plus friand des boissons sans alcool. Bière ou cocktail bien sûr. Ça donne l’impression d’être en soirée sans avoir mal à la tête le lendemain. En tant qu’amateur de vin, c’est avec plaisir que je goûterai donc du vin sans alcool. Et je n’aurai pas le sentiment de faire un affront aux vignerons de la région. Cela va-t-il leur permettre d’élargir leur clientèle? Je ne le crois pas non plus. Il faut selon moi souligner le travail de ceux qui ont réussi à aller au bout de ce processus chimique qui permet de désalcooliser des boissons. Dans une société de plus en plus consciente des enjeux de santé publique, boire du vin sans alcool représente un choix responsable. L’alcool, en excès, peut entraîner de nombreux problèmes de santé, tant physique que mentale. Choisir de boire sans alcool permet de profiter des bienfaits sociaux d’un verre de vin sans en subir les effets négatifs: pas de gueule de bois, pas de risques d’intoxication, pas de perturbation du sommeil. De plus, le vin sans alcool est souvent moins calorique, ce qui peut également séduire ceux qui cherchent à maintenir un mode de vie sain. Et ça nous permettra d’en prendre un dernier pour la route… sans culpabiliser.
Le vin, cet intouchable
Qu’on se le dise tout de suite, je n’ai jamais trempé mes lèvres dans un verre de vin désalcoolisé. Mais ayant plusieurs fois fait l’expérience de la bière sans alcool – avec un résultat que je ne qualifierais pas de désastreux, mais de peu réjouissant –, j’ai pu me forger un avis et suis convaincu que combattre ces nouveautés ne fait pas beaucoup de sens. Il y a d’abord la question du volume: loin de concurrencer le vin, sa variante désalcoolisée ne fait pas, et ne fera à mon avis jamais, de l’ombre aux cépages de notre région. Que les vignerons s’en inquiètent me semble être une absurdité, car cette offre ne rivalise pas avec leur marché. J’entends aussi l’argument de la tradition ancestrale, de l’histoire, du patrimoine. Changer le vin en lui retirant son alcool relèverait du sacrilège. Pas étonnant que ce type de discours apparaisse dans un canton si fortement attaché à la vigne – les Vaudois étant les plus gros buveurs du pays (ils consomment en moyenne la moitié d’un verre de vin par jour). Mais il y a de la place pour tout le monde, n’est-ce pas. Le vin désalcoolisé est un produit comme un autre, peut-être le reflet de son temps, et le mettre au pilori ne fera pas avancer le débat.
Une bête question d’appellation
Alors quoi, tout ce qui est nouveau et ose venir chahuter notre vie bien rangée, voire chatouiller les traditions, devrait être âprement combattu? Comme mes collègues, je refuse de qualifier d’emblée le vin désalcoolisé de bêtise. Reste donc, dans l’énoncé ci-contre, la question de la tendance. Le contexte paraît propice: depuis 1992, la consommation quotidienne d’alcool ne cesse de baisser, selon des chiffres d’Addiction Suisse. Ce qui est réjouissant pour la santé publique… et pour l’économie, certains trouvant toujours un moyen d’innover pour répondre à de nouvelles demandes. Effet de mode ou changement durable de comportements, le temps nous le dira. En attendant, que reproche-t-on vraiment au vin sans alcool? À part qu’on ose lui donner le nom de vin, je ne vois pas. Mais que les œnophiles se rassurent! Il y a là aussi un savoir-faire, des étiquettes élégantes et un public de connaisseurs. On est bien loin des mélanges douteux de raisins non identifiés fourrés dans des citernes ou des bouteilles en plastique. Alcool ou pas, le consommateur saura faire la différence. Comme pour le reste.
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