L’ivresse des profondeurs du Servagnin | Journal de Morges
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L’ivresse des profondeurs du Servagnin

L’ivresse des profondeurs du Servagnin

Sur le bateau du pêcheur «Loni», Jérémie Rossier et Raoul Cruchon mettent les bouteilles à l’eau sous l’œil avisé d’Yves Rattaz, Jean-François Crausaz et Aurélien Dépraz, du Salon nautique. Photo: Cardoso/VQH

Dans le cadre du jubilé du cépage et peu avant l’ouverture du Salon des Vins, quelque 300 bouteilles ont été immergées dans le lac Léman.

Un soleil rassurant, une eau claire et calme, peut-être le temps était-il si clément en 1420, date à laquelle Marie de Bourgogne traversa le lac afin d’échapper à la peste qui sévissait de l’autre côté? Nul ne peut en témoigner aujourd’hui. Pourtant, plus de 600 ans après, c’est une météo idéale qui a salué les nombreux vignerons et invités venus attester d’un événement aussi insolite qu’unique dans la région.

Afin de célébrer le 600e anniversaire de l’introduction du Servagnin dans la région, offert par Marie de Bourgogne aux vignerons de Saint-Prex comme remerciement pour leur accueil chaleureux, plusieurs centaines de bouteilles de ce cru ont été immergées. Une idée que l’on doit à Yves Rattaz, président de la Fondation Bolle. «C’est dans le cadre du Salon nautique du Léman qui aura lieu en novembre à Genève, explique-t-il. Les organisateurs souhaitaient mettre sur pied un événement un peu «fun», une immersion de bouteilles et on m’a demandé si je connaissais des vignerons.»

Si l’usage voudrait que pour améliorer nos relations chacun tente de mettre un peu d’eau dans son vin, nous faisons le pari inverse de commencer par mettre du vin dans l’eau

Raoul Cruchon, président du comité d’organisation du 600e

Ni une, ni deux, Yves Rattaz contacte Raoul Cruchon qui fait immédiatement le lien avec les 600 ans du Servagnin. Une occasion de plus de marquer le coup. «Le lac comme le Servagnin sont des symboles transfrontaliers qui jettent des ponts entre la Romandie et la Savoie», relève le président du comité d’organisation de cet anniversaire. Avant de se lancer dans une des tirades poétiques dont il a le secret: «Ce lac nous unit et nous sépare, or si l’usage voudrait que pour améliorer nos relations chacun tente de mettre un peu d’eau dans son vin, nous faisons le pari inverse de commencer par mettre du vin dans l’eau.»

Immergées

Ce sont six caisses de 45 bouteilles chacune qui ont été chargées sur le bateau du pêcheur Manu Torrent et celui de son confrère «Loni» afin de reposer au fond du lac plusieurs mois. Une action inédite qui a demandé des précautions. «Nous avons dû cirer les bouchons bien davantage que d’habitude dans le but d’éviter que les bouteilles s’ouvrent sous la pression», détaille Chantal Chambaz-Duruz, présidente des Vins de Morges. Un test avait d’ailleurs été effectué en novembre dernier pour trouver le bon «calibrage» de fermeture. Une vingtaine de flacons ont été remontés à la surface trois mois plus tard.

Une première tentative qui n’a pas montré de véritable impact sur le goût. Pour Michel Perey, vigneron-encaveur et membres du comité du 600e, c’est une question de durée. «L’expérience a déjà été faite du côté du Château de Chillon, mais ils les ont laissées sous l’eau plusieurs années, bien plus longtemps que ce qui est prévu ici.»

Car une partie de ces 300 bouteilles sera émergée dans le cadre du Salon nautique du Léman en novembre, tandis que l’autre attendra la prochaine édition de Divinum pour être dégustée, soit dans une année presque jour pour jour. Dans le cas des flacons du «Clos de Chillon lacustre», ce sont trois ans d’immersion dont «le principe de conservation a permis une bonification unique de ces bouteilles», peut-on lire sur le site Internet dédié. Reste à voir ce qu’il adviendra du Servagnin et si ce cru lacustre offrira de réelles surprises gustatives.

L'immersion en images...

Immersion Servagnin - 

06.04.2022
Immersion Servagnin - 06.04.2022
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06.04.2022
Immersion Servagnin - 06.04.2022
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06.04.2022
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06.04.2022
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Immersion Servagnin - 06.04.2022
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Immersion Servagnin - 06.04.2022

À 30 mètres

Sur le bateau de «Loni», Jérémie Rossier et Raoul Cruchon ont uni leurs efforts afin de faire descendre les caisses à une trentaine de mètres de profondeur. Sous le regard attentif de plongeurs présents pour immortaliser le moment grâce à des vidéos sous-marines.

«Nous voulons confier à notre cher Léman le soin d’un affinage mélodieux au rythme des aléas lacustres, a conclu Raoul Cruchon. Notre Servagnin sera balloté, dorloté sous l’œil goguenard des poissons et la complaisance des mollusques qui trouveront là des maisons originales pour s’accrocher à la vie.»

Nul doute que les différents résidents du lac prendront soin de ces caisses quelque peu particulières qui se sont incrustées dans leur vaste demeure. «En espérant que personne ne vienne nous les piquer entre temps», plaisante Laurent Bally, des Vins de Morges qui, comme ses collègues, a déjà hâte de pouvoir déguster ce Servagnin, millésime lémanique.

Divinum c'est (re)parti

«Divinum, c’est la seule manifestation annuelle qui se déroule tous les six mois», a plaisanté Frédéric Borloz, président de la Fédération suisse des vignerons (FSV). Après une édition exceptionnelle en novembre 2021, le Salon des Vins a retrouvé sa place traditionnelle dans le calendrier, début avril et a été inauguré mercredi soir devant un parterre d’invités qui fleurait bon les élections cantonales de dimanche. «J’ai rarement vu autant de monde à la partie officielle en cinq ans», a souligné Richard Chassot avant de souhaiter un plein succès aux 125 vignerons qui présenteront quelque 1400 crus de tous horizons jusqu’à lundi.

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